Mais qu’est-ce qui te prend ? (Texte de Dylan Pédron)

Dites-le avec une lettre

Il y a des choses qu'on aimerait pouvoir écrire... Mais on ne sait pas toujours par où commencer, comment trouver les bons mots, véhiculer la bonne intention. Aujourd'hui, on vous aide à vous lancer et envoyer la lettre parfaite:

“Mais qu’est-ce qui te prend ?”

Un nouveau texte de Dylan Pédron.

C’est vrai ça, qu’est-ce qui me prend ?

J’enlève mes bras de ses épaules.

Coucher avec elle ne me donne pas droit à un “quota calin”. Et d’ailleurs, si je n’ai plus que des relations physiques sans engagement, c’est pour ne pas avoir à supporter des câlins insipides, toujours trop présents et exigés même. Alors pourquoi celui-là ? Pourquoi avoir voulu me poser dans ses bras ?

“Laisse tomber, j’y vais, j’ai encore du boulot, et de la route.

– Tournage ?

– Non, écriture. En croisant les doigts pour trouver un bus qui me ramène dans ma cambrousse.

– T’es sûr que tu veux pas rester ? T’as pas l’air bien…

– Moi ? Ça va bien ! Ça va toujours bien !”

Je l’embrasse sur le front quand elle me tend ses lèvres, puis claque la porte derrière moi, ne laissant comme seule trace de mon passage que mon odeur sur l’oreiller et un petit-beurre à moitié grignoté.

Comme d’habitude. Ne pas laisser de trace. Le moins d’ADN laissé implique le moins de retour exigé. Être une ombre. Un ami qui répond dès qu’on lui parle, qui sort quand on lui propose, et qui donne de son corps quand l’occasion se présente. Mais surtout quand la fille est nouvelle. Tout est clair et défini dès le départ. Je n’ose plus me réveiller avec un engagement chaque matin, ce n’est pas pour avoir la même personne à mes côtés après chaque acte sexuel.

Dans le bus, la question me trotte encore. Qu’est-ce qui m’a pris ?

Un câlin quoi ! Je sais que je suis câlin, mais avec ma famille, mes amis et mon chien. Pas avec mes plans ! Surtout pas ! C’est prendre le risque de glisser son nez dans un cou étranger et d’en ressortir avec son odeur gravée dans le crâne. Ou dans le cœur. Et j’ai pas envie de m’attacher. Pas la force.

Et le sexe alors ? C’est pas un attachement peut-être ? Mmh .. Non, Dylan, le sexe, c’est juste pour ne pas perdre la main ! Ne pas oublier le contact de la peau contre la sienne, le regard qui fait craquer, qui enflamme. Ne pas oublier la sensation des lèvres sur des zones sensibles, comme quand elles les passent sur mon torse. Tiens d’ailleurs, c’est bizarre ça. Pourquoi mon torse est sensible à ce point ? Sûrement mon coeur qui frissonne là-dessous ..

***
Le RER part.

Pourtant, quand je fais l’amour – car oui, pour moi, même sans engagement, ça reste une forme d’amour. Un amour de la vie – j’enlace, j’embrasse, je caline, je berce, je m’accroche, comme pour ne pas laisser ce corps partir loin de moi, comme pour ne pas clore ce moment où rien d’autre qu’elle et moi n’existe.

Mais là, ce câlin, c’est bien une première depuis longtemps ! C’est arrivé, bien sûr, à une époque où mon coeur brisé d’un amour de trois ans pensait se consoler entre les jambes d’une autre femme. Quel con ! Si le sexe était un remède émotionnel, ça se saurait.

Et depuis, plus de câlin .. Alors pourquoi maintenant ? Pourquoi elle ?

Je ne vais pas sortir le truc du “j’ai eu un coup de foudre”, ce serait me mentir …

 

Et si tout ceci me manquait ?

C’est vrai, quand j’y repense, souvent chez moi, quand je suis seul entre mes draps, je me ressasse mon bonheur d’antan, ces petits souvenirs et détails loin du classique de l’amour, mais qui me faisaient vibrer comme aucune autre histoire n’avait réussi à le faire.

Je suis chez moi. Une capsule, un café, un paquet de spéculoos. Et je n’ai toujours pas de réponse …

Je m’installe en tailleur, sur ma chaise, dans la cuisine. Ça fait longtemps que je n’ai pas fait ça à 16h. Très longtemps. C’est simple, la dernière fois, c’était avec mon ex. Notre rituel du goûter.

Elle, avec son thé, son miel et ses tartines. Moi, avec mon cappuccino et mes gâteaux. Manque plus que la chienne sur les genoux.

 

Ah bah tiens, quand on parle du (mini-)loup.

 

Mais même si Mady a retrouvé sa place, ce n’est plus pareil. Il n’y a plus de thé. Plus de sourires. Plus de “tu veux que je te fasse une tartine grillée avec du Nutella ?”. Plus de Je t’aime.

C’est comme les grignotages au lit, entre dragibus, schtroumpfs, Pringles, How I Met Your Mother, True Blood et N’oublie Jamais.

Et ces câlins qui duraient 10 ans, à se caler dans le cou de l’autre, et à respirer son parfum comme s’il était aussi vital que le dioxygène de l’air.

 

C’est peut-être ça que j’ai essayé de retrouver ce matin…

Mais pourquoi ? Pourquoi maintenant ?

Après tout ce travail sur moi pour faire cette carapace, pour devenir froid, consommateur et distant .. Je croyais être suffisamment forgé pour ne plus en avoir besoin !

Il faut croire que malgré les efforts, on ne peut changer sa nature profonde…

 

Et ma nature réclame des bisous, des câlins, des goûters en tête-à-tête, des restos en amoureux, des plateaux télé, des parties de console en étant autant mauvais joueur l’un que l’autre, des surprises, des cadeaux, des rires, des larmes. Des larmes de joie, de bonheur, de plénitude et de plaisir.

Mais aujourd’hui, les larmes sont de tristesse, les rares fois où elles sortent. Sinon elles restent à l’intérieur, gelées, dures comme la pierre. Et ça fait mal, rien que d’y penser.

 

La tête n’a rien à faire dans le passé. C’est passé. Rien n’est à refaire. Tout est à garder, en enseignement. Ne jamais regretter quelque chose qui nous a fait sourire, c’est pourtant ce qu’on m’a appris. Se donner la chance d’être heureux aussi. Et surtout, prendre les signes du destin pour des opportunités.

Et si le câlin en était un, de signe ? Le signe d’une nouvelle chance. D’un nouveau départ. Il faut toujours écouter le destin …

 

Je prends mon téléphone.

“Allo ?

– Oui, c’est moi.

– Tu as oublié un truc ?

– Peut-être .. Tu fais quoi cet aprem ?

– Rien, pourquoi ?

– J’arrive. J’ai un petit-beurre à finir.”

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