Chanson douce de Leïla Slimani : Un roman dramatique et déstabilisant

Je ne pouvais pas ne pas vous parler de cette perle de la littérature !  Chanson douce est le roman de Leïla Slimani qui a remporté le Prix Goncourt 2016. Il s’agit d’un roman sur le couple parental, son envie de liberté, son besoin de se décharger mais aussi et surtout, sur la forme moderne de l’esclavage à travers une nounou qui ne vit que pour s’occuper des enfants des autres.

Chanson douce : La quatrième de couverture

Lorsque Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d’un cabinet d’avocats, le couple se met à la recherche d’une nounou. Après un casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l’affection des enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Peu à peu le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu’au drame.
À travers la description précise du jeune couple et celle du personnage fascinant et mystérieux de la nounou, c’est notre époque qui se révèle, avec sa conception de l’amour et de l’éducation, des rapports de domination et d’argent, des préjugés de classe ou de culture.
Le style sec et tranchant de Leïla Slimani, où percent des éclats de poésie ténébreuse, instaure dès les premières pages un suspense envoûtant.

Chanson douce : Mon avis sur ce roman de Leïla Slimani

A l’instar de la première phrase de Camus dans l’Etranger « Aujourd’hui, maman est morte« , Leïla Slimani entame Chanson douce avec une phrase coup de poing : « Le bébé est mort« . Le décor est posé. Le roman commence donc par la fin et vient retracer tous les faits qui ont amené la nounou à commettre l’impensable.

J’ai tout simplement adoré ce roman parce que l’auteure parvient avec brio à nous faire entrer dans les méandres psychologiques de Louise. Mais surtout, le malaise, la gêne s’installe subtilement, à pas de loup. Le lecteur n’a pas le temps de se rendre compte de ce qu’il se trame, qu’il est déjà pris au piège, incapable de faire machine arrière, exactement comme les parents. Contrairement au roman d’Agnès Martin-Lugand « J’ai toujours cette musique dans la tête« , où je trouvais que les ficelles étaient grossièrement tirées, dans ce roman, Leïla Slimani maîtrise parfaitement l’art du thriller psychologique et nous plonge dans la noirceur quasi horrifique d’une famille pourtant banale.

Le style de l’auteure est tranchant, sec, aucune douceur ne transparaît dans ce roman portant pourtant le titre qui rappelle la tendresse enfantine ; Chanson douce. Son style littéraire colle donc parfaitement avec l’histoire qu’elle raconte. Le lecteur a souvent la sensation d’être un voyeur qui regarde à travers la serrure, contemplant sournoisement des scènes anodines puis de plus en plus étranges.

Louise semble être la nounou parfaite, elle joue avec et comme les enfants, elle fait en plus le ménage et prépare les repas alors qu’elle n’a pas à le faire. « Louise a mis de la musique… Elle a préparé des chansons et des tours de magie. Elle se déguise sous leurs yeux stupéfaits et les enfants, qui ne sont pourtant pas faciles à berner, savent qu’elle est des leurs. » Toutes les connaissances de Myriam et de son mari envient cette nounou parfaite qui semble tout droit sortie d’un Disney.

Et pourtant… Plus l’on avance dans le roman, plus l’on sent une corde se glisser sur notre cou et se resserrer très, très lentement, jusqu’à ne plus pouvoir respirer.

L’horreur se profile et si les signes annonciateurs se font rares, ils nous laissent à chaque fois un sentiment nauséeux, de dégoût. Je pense notamment à la partie de cache-cache sadique ou à la carcasse lavée à la javelle.

L’auteure maîtrise l’art du malaise, je crois ne m’être jamais sentie ainsi à la lecture d’un roman. Ce sentiment d’emprise totale et d’impuissance face à l’inévitable. 

Bref, je recommande vivement Chanson douce, à condition d’être prêt !

Quelques extraits du roman « Chanson douce » :

« On se sent seul auprès des enfants. Ils se fichent des contours de notre monde. Ils en devinent la dureté, la noirceur mais ne veulent rien savoir »

« La vie est devenue une succession de tâches, d’engagements à remplir, de rendez-vous à ne pas manquer. Myriam et Paul sont débordés. Ils aiment à le répéter comme si cet épuisement était le signe avant-coureur de la réussite. »

« Nous ne serons heureux, se dit-elle alors, que lorsque nous n’aurons plus besoin les uns des autres. Quand nous pourrons vivre une vie à nous, une vie qui nous appartienne, qui ne regarde pas les autres. Quand nous serons libres. »

« Louise s’agite en coulisses, discrète et puissante. C’est elle qui tient les fils transparents sans lesquels la magie ne peut pas advenir. Elle est Vishnou, divinité nourricière, jalouse et protectrice. Elle est la louve à la mamelle de qui ils viennent boire, la source infaillible de leur bonheur familial. »

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