Lettre de Juliette Drouet à Victor Hugo « Je voudrais n’être qu’une âme sans corps pour ne te quitter jamais »

Dites-le avec une lettre

Il y a des choses qu'on aimerait pouvoir écrire... Mais on ne sait pas toujours par où commencer, comment trouver les bons mots, véhiculer la bonne intention. Aujourd'hui, on vous aide à vous lancer et envoyer la lettre parfaite:

Juliette Drouet (1806-1883), en plus d’être la maîtresse de Victor Hugo, fut une grand épistolière. Elle envoya chaque jour des lettres au poète sans en attendre de réponse. Plus de ving-deux mille lettres ont été retrouvées par une équipe universitaire… Un demi-siècle de correspondances amoureuses ! Le génie Hugo connut avec la comédienne Juliette une folle liaison amoureuse durant cinquante ans, en plus de son épouse. 5510 lettres sont déjà accessibles sur internet.

Voici trois lettres de Juliette Drouet écrites en une seule et même journée :

Pour plus de lettres d’auteurs connus c’est ici !

30 juin [1837], vendredi matin, 1 h. ¼ après midi.

Cher petit homme bien aimé, je suis très geaie. J’ai du bonheur plein mon cœur et du rire plein ma GEULE. Je suis si heureuse quand vous daignez me donner vos pieds à tenir pendant une matinée. C’est plus doux que ceux du bon Dieu lui-même, en supposant qu’il les donne quelquefois à toucher à ses ferventes dévotes. J’aurais bien envie de vous dire toutes sortes de belles choses, mais je sais d’avance que mon admiration passant par le bec de ma plume se transformera en grotesque hurlement qui vous fera hausser les épaules et boucher vos jolies petites oreilles. J’aime mieux m’en tenir à l’expression toute simple de mon amour. C’est un légume qu’aucune sauce ne peut gâter, n’en déplaise à M. SOULIÉ. Ainsi, un je THÊME du fond de l’âme, et plus ravissant et plus savoureux qu’un autre je t’aime venu à grand renfort de fumier grammatical. C’est pourquoi j’ai tant de confiance dans mon amour et si peu dans mon esprit. J’ose bien te dire que je t’aime mais je n’ose pas te dire que je t’admire quoi que cela soit aussi vrai que l’autre chose.

Juliette

30 juin [1837], vendredi soir, 8 h. ¾

Cette fois, mon pauvre ange, je me livre à toute mon impatience, qu’il me serait impossible d’ailleurs de retenir. Je voudrais savoir si tu as vu M. Louis, et ce qu’il pense de notre chère petit ange, de notre belle petite fille. D’un autre côté, je sens bien que toute ta sollicitude et tous tes soins comme tous tes instants doivent être donnés à cette chère petite femme qui se mêle déjà de souffrir comme si la vie n’était pas assez longue sans cela. Je ne me fâche pas de t’attendre, et pourvu que je sache que j’ai un petit coin de ton âme dans lequel tu me permets de loger tout entière quoique à l’étroit, je suis résignée, et j’aurai la patience d’attendre que ma chère petite Dédé n’ait plus aucun vilain bobo sur sa jolie petite personne. En attendant je vais être bien malheureuse et bien tourmentée jusqu’à ce que je t’aie revu. Tâche que ce soit tantôt, car je n’exagère pas en te disant que je suis tourmentée et malheureuse. Je t’aime tant et j’aime tant tes autres petits Toi, qu’au moindre petit mal dont vous êtes atteints les uns et les autres je souffre plus que vous-mêmes. À bientôt et avec de bonnes nouvelles, j’espère. Que ce bientôt me paraît long et que je voudrais n’être qu’une âme sans corps pour ne te quitter jamais, surtout dans des circonstances comme celle-ci. Je t’aime mon Victor.

Juliette

30 juin [1837], vendredi soir, 11 h ¼

Je suis sur des charbons ardents. Qu’est-il donc survenu mon Dieu à cette pauvre petite bien-aimée? Je fais toutes sortes de mauvaises suppositions qui ne sont pas faites pour me calmer. Il me semble que sans des raisons impérieuses tu ne me laisserais pas dans cette inquiétude mortelle, ce qui redouble mon inquiétude. J’écoute tous les bruits et tous les pas de la rue, croyant enfin y surprendre les tiens, mais rien ne s’arrête et je continue de me tourmenter comme si j’avais la certitude que la chère petite malade est en danger. Et puis comme je ne peux pas supporter la pensée que tu souffres ou que tu sois triste, On ouvre la porte. Si c’était toi, mon Dieu, avec de bonnes nouvelles, quelle joie ! Mais non. Si, si c’est toi, oh ! mon Dieu.

Juliette

(Source : http://www.juliettedrouet.org/)

 

 

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