Quelques extraits de certaines de mes nouvelles

Dites-le avec une lettre

Il y a des choses qu'on aimerait pouvoir écrire... Mais on ne sait pas toujours par où commencer, comment trouver les bons mots, véhiculer la bonne intention. Aujourd'hui, on vous aide à vous lancer et envoyer la lettre parfaite:

« –          Je m’en vais.

–          …

–          Je souffre trop de ton indifférence. Je souffre trop de notre évolution. La courbe décroissante de notre relation est en parfaite harmonie avec la crise que traverse notre pays. Tu m’écoutes ? Bien sûr que non, tu ne m’écoutes pas. Tu ne m’as jamais écoutée, tu t’es mis avec moi parce que je suis la seule cruche qui ait bien voulu d’un gamin bordélique et macho, d’un petit bourge radin jusqu’aux dents incapable d’exprimer le moindre sentiment. Cinq ans qu’on est ensemble, et pas une seule fois tu n’as proposé qu’on vive sous le même toit. Antoine putain, mais dis quelque chose !

–          Que veux-tu que je te dise ? Tu es hystérique. Regarde-toi, tu fais peur à voir.

Mon visage s’était mécaniquement tourné vers le miroir. C’est vrai que je faisais peur. Ma bouche était crispée, comme si je venais d’étrangler un être humain. Je ressemblais à un zèbre, un vilain zèbre qui aurait hérité de rayures difformes. Le mascara n’est pas toujours le meilleur ami des femmes comme on peut le prétendre. J’étais peut-être hystérique. Mon cœur se pressait comme un citron, on aurait dit qu’Antoine avait toujours eu pour ambition de presser mon jus d’émotion jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’une écorce, un coffre qu’il aurait soigneusement vidé de tous ses trésors. J’avais si mal. Ses mots, son indifférence, son regard désabusé qu’il posait sur moi comme un flingue sur ma tempe… Comment pouvait-il me faire ça ? »

***

 « Jeanne allume son téléviseur, elle a hâte de retrouver Julien Lepers pour « Question pour un champion ». Jeanne fait machinalement trois choses dans la journée : elle mange, se lave, dort. Le point commun de ses trois étapes est l’omniprésence de la télévision. Depuis la mort de Charles, Jeanne ne vit qu’à travers son écran. Ses doigts noueux happent la télécommande, comme un drogué qui aurait aperçu une seringue pleine. Elle monte le son. Elle se sent moins seule lorsqu’elle entend ces voix. Son visage se détend, elle se sent bien. Le téléphone sonne. Elle râle. Qui ose la déranger lors de son tête-à-tête avec Julien ?

–          Bonjour Mamie, c’est Julie

–          Ah bonjour Julie,

Jeanne est partagée entre le bonheur d’entendre sa petite fille qu’elle ne voit que très peu depuis qu’elle étudie dans une grande prépa littéraire à Paris et l’envie monstrueuse de  simuler une panne de courant pour raccrocher. Elle baisse finalement le son »

 ***

« Arrivés en haut de ses immenses escaliers, je me rappelle avoir pris une bouffée de Ventoline, et je n’en n’étais pas fière. Je me souviens de sa table basse et les petits sachets garnis de poudre qui la décoraient. Il en versa un dans un verre qu’il me tendit. Une heure après l’avoir ingurgité, une sensation de bonheur envahit tout mon être. C’était bon. Mon corps tremblait de joie,  je regorgeais d’énergie, j’aurais pu escalader les cieux à 4h du matin, j’aurais pu combattre un lion, traverser des sables mouvants. Je me sentais totalement désinhibée, j’avais envie de lui, j’avais besoin de sensations nouvelles pour combler ma soif de liberté et de béatitude. J’étais redevenue une enfant aimante et euphorique, bien loin de la fille que je suis devenue : méprisante et fataliste. J’avais envie de vivre, je désirais plus que tout que cette sensation hallucinante qui inondait mon être ne cesse jamais. X. avait l’air de ressentir le même bien-être que moi. Et j’étais bien près de lui. Moi qui attendais le prince charmant pour connaître ces fameuses « premières fois » que me content mes amies… J’ai été servie ! J’aimais Pierre. A ce moment précis, je l’aimais. D’un amour étrange et irrégulier mais je lui aurais tout donné.

Je lui ai tout donné.

Je me rappelle l’avoir magnifiquement branlé, comme si j’avais fait ça toute ma vie. Nous avons baisé sauvagement (non, je n’ai toujours pas fait l’amour). « 

 ***

« J’adore entrer dans un univers qui m’est inconnu, sentir la tiédeur de l’atmosphère, l’odeur de l’ancienne locataire, marcher d’un pas peu assuré dans cet habitat vivant, passer du carrelage au parquet,  observer les trous au mur, creusés par le temps, en espérant qu’un vieux coffre remplis de vieux objets s’y cache. J’ai du mal à trouver mon bonheur malgré toutes les sensations agréables que j’éprouve en m’infiltrant tel un voleur dans tous ces appartements dont j’ignorais encore l’existence quelques heures auparavant. Il y  a toujours un détail qui m’empêche de me projeter : un bureau sans fenêtre, une salle de bain rose (les travaux ne me font pas peur, mais ce rose fuchsia délavé me hantera toute ma vie), un salon trop proche de la chambre, un quartier trop calme, un arrondissement trop vivant, des charges mensuelles trop élevées, un bébé que j’entends crier à l’étage du dessous, un long  couloir étroit… On arrive 17 rue Mansart à Pigalle, il s’agit de l’un de mes quartiers de prédilection. On monte les quatorze marches ; cela nous change de nos six étages actuels. L’agent immobilier ouvre la porte des mystères et je me retrouve face à ce couloir où les murs sont couverts de livres. Marion s’extasie : « regarde chéri, il nous faudrait la même bibliothèque pour mettre tous mes livres. C’est fantastique n’est-ce pas ? Autant de visions du monde, autant d’âmes regroupées dans un seul mur. » Moi, elle m’étrique cette bibliothèque, cette montagne de pages  m’étouffe : jamais on n’habillera nos  murs de bouquins. « 

***

« Mais son amour pour lui s’évaporait au fil des jours. Ils se disaient bonjour le matin, ils avaient toujours de la tendresse l’un envers l’autre, mais la magie avait totalement disparu pour se figer dans un passé qui leur était désormais inconnu. Elle avait voulu l’aimer comme avant, elle avait essayé de se faire belle, d’acheter de la lingerie sexy pour le rendre fou. Et ça fonctionnait. Le temps d’une soirée. Il n’y avait plus de fougue. Ils étaient rentrés dans le cercle infernal de la vie à deux. Ils ne vivaient plus dans le présent mais dans le futur, tandis que son « moi intérieur » continuait de s’évader dans le passé. Elle avait voulu le brusquer, lui hurler qu’il fallait qu’ils se battent, qu’ils passent outre ces difficultés communes à tous. Mais il n’entendait pas. Il était heureux, lui, dans leur monde qu’il se donnait tant de mal à construire. Et, sans qu’il ne s’en aperçoive, elle commença à disparaître de cet univers qui lui apparaissait comme une prison dorée. Sa prison à vie. Elle prit peur. Une peur sauvage qui vous empoigne, vous tord la gorge et vous saccage le moral. Une peur sans nom, qui vous ligote le cœur et vous noue l’estomac. »

***

« Vous pensez peut-être que c’est simple d’être un garçon ? Vous croyez que je ne fais pas d’efforts, que c’est facile d’aller vers la fille que je convoite en cachette ? De lui demander son prénom, rien que son prénom ? Vous pensez que c’est facile de lui avouer que je la trouve belle aujourd’hui, que j’adore la façon dont elle a relevé ses cheveux pour laisser découvrir sa nuque ? Que mon cœur bat la chamade lorsqu’elle pose son regard sur moi et que je me sens aussi à l’aise qu’un poisson dans l’air ? Que j’aimerais l’inviter quelque part, je ne sais même pas où, juste passer du temps avec elle pour apprendre à la connaître ? C’est dur. »

***

« Il la sert contre lui, une main sur son ventre, l’autre dans ses cheveux et sa bouche dans le creux de sa nuque. Sa première main commence doucement à descendre un peu plus bas.

–          Pas ce soir j’ai mal au ventre à cause des cookies.

–          Tu as toujours mal au ventre.

–          Pas du tout ! Tu inventes encore !

–          Ou à la tête…

–          Ca va les réflexions pour ce soir merci.

Il se retourne, colle ses fesses contre les siennes et ferme les yeux.

–          Ah ok…

–          Quoi ?

–          Donc tu ne me désires vraiment plus.

–          Hein ? Je viens d’essayer de te toucher, tu m’as repoussé comme une pucelle apeurée !

–          Ah bah t’essaye pas longtemps, tu rebrousses chemin à la première petite difficulté…

–          T’es incroyable ! Tu veux qu’on fasse l’amour oui ou non ? Ce n’est quand même pas compliqué de savoir si tu as envie de moi !

–          J’avais envie mais maintenant je n’ai plus envie quand je vois comment tu n’as aucune motivation.

–          Bonne nuit Boubou, je suis fatigué.

–          Comme ça s’est réglé… »

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